Le comportement violent d’un salarié

Mise en place, modification et adjonction au règlement intérieur : conditions
juin 29, 2021
Recours systématique aux heures supplémentaires : l’accord du salarié s’impose !
novembre 14, 2021

Le comportement violent d’un salarié

Le comportement violent d’un salarié résultant d’un harcèlement moral ne constitue pas une faute grave

Telle est la position adoptée par la Cour de cassation dans un arrêt du 12 mai 2021.

1- Retour sur les faits

En l’espèce, un salarié a été licencié pour faute grave à la suite d’une altercation avec sa supérieure.

Selon la lettre de licenciement « au cours d’une réunion » il l’a « violemment pris[e] à partie » « en l’insultant et en tentant de la frapper ».

Il est donc reproché au salarié d’avoir eu un « comportement violent » à l’égard de sa supérieure hiérarchique, notamment au moyen d’une « agression verbale », l’agression physique n’ayant été empêchée que grâce à l’intervention d’un tiers.

2- L’argumentation du salarié

Le salarié expliquait son attitude par « une pression morale et une surcharge de travail », ce qui l’avait amené à consulter un psychiatre qui a attesté de signes « d’un syndrome post-traumatique avec la présence de stress, de pression morale, de conflits professionnels ».

Toute la question était donc de savoir si le licenciement pour faute grave d’un salarié résultant de l’agression verbale qu’il a commise en conséquence directe du harcèlement moral qu’il a subi, est justifié ?

3- La réponse de la Cour de cassation

La faute grave est une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail qui, de par son importance, rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise (Cass. soc., 27 septembre 2007, nº 06-43.867).

Elle permet donc le licenciement sans préavis et sans versement de l’indemnité de licenciement.

Il a par ailleurs déjà été jugé que les agressions verbales peuvent être qualifiées de faute grave et notamment si ces dernières visent un supérieur hiérarchique (Cass. soc., 18 janv. 2011, n° 09-67.164).

Pourtant, la cour d’appel a jugé sans cause réelle et sérieuse ce licenciement.

Les juges du fond ont en effet retenu que « le comportement violent du salarié résulte de son état pathologique qui est la conséquence du harcèlement moral dont il était victime et ne peut donc constituer une faute grave justifiant son licenciement ».

Cette décision est approuvée par la Haute Juridiction laquelle tient compte du contexte dans lequel les faits reprochés sont intervenus.

C’est à bon droit que la cour d’appel, ayant constaté que l’agression verbale commise par le salarié résultait de son état pathologique, conséquence du harcèlement moral dont il était victime, a pu en déduire que ce comportement ne constituait pas une faute grave rendant impossible le maintien de l’intéressé dans l’entreprise.

Il est intéressant de noter que la Cour de cassation avait déjà estimé par le passé que le comportement inapproprié d’une salariée « était une réaction au harcèlement moral dont la salariée avait été victime » et ne justifiait donc pas un licenciement (Cass. soc.,10 juillet 2019, n° 18-14317), ou qu’une vive altercation et le geste violent par lequel le salarié avait saisi le bras de la gérante qui s’expliquait par le contexte et l’attitude de provocation de celle-ci n’étaient pas constitutifs d’une faute grave (Cass. soc., 23 juin 2010, n° 08-44.160).

La Cour de cassation consacre ainsi « l’irresponsabilité sociale » du salarié victime de harcèlement.

Cass. soc., 12 mai 2021, nº 20-10.512